Voyage de l’Arabie Heureuse, Jean de la Roque
Texte de présentation du "Voyage de l’Arabie Heureuse". Les Corsaires de Saint-Malo sur la route du café. 1708-1710 et 1713. Editions La Lanterne Magique. Annoté par Eric Poix. 2008, préfacé par Jean-Pierre Brown. 19 cm x 12, 5 cm, 206 pages. Prix de vente : 17 euros. Notre impression : Excellente édition, inédite et très originale car très richement annotée, fort recommandée par nous même parce que l’ouvrage original est introuvable (très précieux) en ancien français.
Autre ouvrage chez le même éditeur que nous conseillons : Voyages aux Indes Orientales, par Johann Christian Hoffmann. Un jeune Allemand au service du VOC, Afrique du Sud, Maurice, Java (1671 – 1676). ELLM.
Le Voyage de l’Arabie Heureuse rencontra un vif succès lors de sa première édition en 1715.
Il relate les deux premières expéditions organisées, au début du XVIIIe siècle, par les armateurs de Saint-Malo à destination du Yémen. Jusque-là, l’importation de café en France était entre les mains des Marseillais qui s’approvisionnaient à Alexandrie auprès d’intermédiaires musulmans. Les armateurs malouins imaginèrent alors de s’approvisionner, pour la première fois, directement au Yémen. Ils espéraient ainsi, en court-circuitant les intermédiaires traditionnels, réaliser de substantiels profits.
Le Voyage de l’Arabie Heureuse présente la particularité d’avoir été rédigé par Jean de la Roque, orientaliste, écrivain et éditeur scientifique à partir des journaux tenus par les participants de l’expédition : journaux de bord ou encore journaux de marche. Alors qu’il rédige ce récit de seconde main, très proche, néanmoins, des récits de première main qu’il a sollicités, Jean de La Roque n’hésite pas, également, à interroger de vive voix les participants ou encore à solliciter par lettres des éclaircissements.
Jean de La Roque dans un style aussi vivant, qu’élégant et concis, restitue à merveille les péripéties des longs voyages qui permettaient de rejoindre le Yémen. Il évoque ainsi la vie difficile des marins lors des traversées, liée à la discipline de fer qui régnait à bord et à l’alimentation carencée. De même, il évoque les escales à terre, parfois heureuses, notamment à Madagascar ou Socotra, parfois désastreuses comme en Abyssinie où ils se heurtent à des naturels hostiles. Enfin, il restitue à merveille les tâtonnements de ces marins, parcourant des mers peu connues, et tributaires, souvent, du recrutement de pilotes autochtones qui, seuls, savent les mener à bon port. Il sait également nous faire partager la joie des marins lorsqu’ils s’emparent de prises, prennent un peu de bon temps ou négocient la pacotille qu’ils ramèneront au pays.
Le Voyage de l’Arabie Heureuse comporte le récit de la première expédition de 1708-1710, ainsi que celui du « Voyage de Moka à la cour du roi d’Yémen entre 1711 et 1713 ». Ces deux voyages répondent à des préoccupations commerciales. Si le premier récit évoque plutôt les contacts noués avec la population autochtone dans les villes portuaires, à l’exception notable du négoce du café dans l’intérieur des terres, à Bayt al-Faquih, ainsi que les observations que les Français glanent ici où là sur leurs hôtes yéménites (gent féminine, commerçants au souk, grands personnages), le second récit nous fait découvrir le Yémen intérieur et décrit par le menu les relations diplomatiques nouées entre Français et Yéménites. Enfin, ces deux récits sont complétés par un mémoire sur le café, dont la culture restait jusque-là fort mystérieuse.
Le livre de Jean de La Roque est réédité pour la première fois depuis 1715. Il est présenté par Jean-Pierre Brown qui confronte le récit de La Roque avec les avancées de la connaissance historique sur expéditions malouines. Il est enrichi de notes rédigées par l’éditeur et agrémenté d’illustrations d’époque ou de cartes de localisation.
Nota : dans le cadre d’une nouvelle exposition, nous aurons l’occasion de présenter ce thème, avec les ouvrages de Jean de la Roque, ainsi que de très nombreux documents, la maquette de Moka (au XVIII e s), etc... faisant suite à l’exposition présentée à Paris et à Saint Malo en 2004/2005 sur l’origine du café...