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L'univers de l'Espace
Reine de Saba









PONCET : la vraie histoire de l’Abyssin !

Un livre... et une exposition inédite jusqu’au 1er avril 2012


Qu’il sera difficile de faire admettre que l’ABYSSIN, remarquable ouvrage écrit par Jean-Christophe Rufin, s’appelle bien Jacques-Charles PONCET (et non Jean-Baptiste Poncet), alors cet ouvrage très original a été découvert dès décembre 2010 : Publié par les Editions La Lanterne Magique, en collaboration avec Eric Poix et José-Marie Bel, presque 3 années de travail pour rétablir la vérité : la vraie histoire de ce médecin français parti du Caire pour Gondar en 1698. Passionnante aventure très illustrée...

Exposition exceptionnelle et totalement inédite à partir de la mi-décembre 2011 à Paris...

et la couverture de l’ouvrage à découvrir dans ce site !


PDF - 170 ko
Poncet Jacques-Charles
Couverture du livre publié par La Lanterne Magique

VOICI la Préface de cet ouvrage par josé-Marie Bel.

Préface

Visitez l’Espace Reine de Saba : exposition de l’aventure de Poncet du 14 décembre 2011 au 20 février 2012. - Exposition prolongée jusqu’au 1er avril 2012- Charles-Jacques PONCET, la véritable histoire.

Quand Éric Poix, l’éditeur de La Lanterne Magique, m’a proposé de collaborer à sa collection des "Grands Voyageurs d’antan", je lui ai proposé de relater le voyage du médecin Charles-Jacques Poncet en Abyssinie sous le règne de Louis XIV : une aventure épique qui débute dans les rues du Caire jusqu’aux hauts plateaux abyssins connue que de quelques historiens. Franc-comtois comme Poncet, Eric Poix s’est aussitôt passionné pour cet homme au destin particulier et pathétique. Et pourtant, en 1997, le sieur Poncet acquit une renommée presque planétaire grâce à la plume de Jean-Christophe Rufin, lauréat du prix Goncourt. Ce médecin humanitaire, sans doute touché par ses missions (comme en atteste son autre ouvrage "Asmara ou les causes perdues") et par la grâce abyssine, a été en poste en Ethiopie. Il le débaptise en Jean-Baptiste et lui fait mener une existence tumultueuse, comique, et même abracadabrantesque, tant au Caire que durant ses voyages en Nubie et séjours en Abyssinie et en France, et même jusqu’en Perse (c/f. Sauver Ispahan), Pourquoi Rufin le fait-il naître à Grenoble et non à Saint-Claude ? pourquoi lui fit-il endosser le costume d’un obscur médecin apothicaire assisté d’un sympathique mage Jurémi usant de fioles ? Il en fait - pour notre plus grand plaisir - un homme de cœur déjouant les intrigues à la manière des grands personnages classiques, en quête de bonheur et de liberté. Rufin le sait, Poncet est envoûtant et les deux font la paire. Il sera ainsi tout le contraire de ce que le Consul Benoist de Maillet dira de lui : "très petit esprit, beau parleur et buveur… mais qu’il faut ménager". Fantaisies d’un écrivain, soucieux de romancer l’histoire et de la marquer de sa plume. Ces deux attrayants et conséquents volumes, L’Abyssin et Sauver Ispahan, laisseront des traces indéniables dans tous les esprits, popularisant une région, des pays, des histoires et des mœurs. Les historiens que nous sommes sont souvent embarrassés par la prédominance du roman sur l’histoire. La transformation pour ne pas dire la déformation de cette dernière, aussi charmante soit-elle, nuit à l’« authentique », même si Rufin se justifie par ses formules… de diplomate : « que la plus haute vérité est celle de l’imagination » et qu’ « elle s’appuie sur aucune autorité, et ne tire sa force que de la conviction qu’elle fait naître chez le lecteur ». Politique ou littérature ? Il y a deux ans, en plein cœur de l’Ethiopie, peu avant la parution de son ouvrage « La Reine de Saba » Marek Halter me rétorquait… « toi, tu es l’historien et tu t’attaches aux véritables faits et lieux, moi, je suis romancier, je m’approprie des histoires et j’en fais ce que je veux ». Certes, mais je ne pourrai jamais m’accommoder d’une Makeda, Reine de Saba éthiopienne, devenue dans son ouvrage la mère de Bilkis, cette même Reine de Saba ainsi nommée au Yémen !

Autre exemple s’agissant de la fabuleuse expédition danoise relatée par Carsten Niebuhr, géographe et seul rescapé, dans les mêmes contrées en 1763. Cette aventure passionnante et pathétique a été relatée dans les années 1960 par le romancier Thorkild Hansen, dans un ouvrage au titre racoleur « la mort en Arabie ». Il sera sacré « meilleure vente/best Seller », puis réédité en France chez un grand éditeur. Désireux de préparer une exposition et un film documentaire sur cette aventure, j’avais composé un synopsis que j’ai présenté Philippe de Broca, reconnu pour ses films de cape et d’épée. Intéressé ? Certes, mais il insista pour y ajouter plus d’émotion, de combats et d’ébats. Nous en sommes restés là ; je n’ai pas voulu déformer la réalité, déjà épique. Plus tard, il en a été de même pour ma participation à un film sur Arthur Rimbaud (l’Homme aux semelles de Vent, avec Laurent Malet), où la liberté des scénaristes, frisant le ridicule, m’offusqua. Car le lecteur ou le spectateur, ignorant l’histoire véridique, retiendra ce qu’il considérera ensuite comme l’authentique vérité. Nous ne pouvons alors que nous réjouir de la réhabilitation de l’aventure exceptionnelle du médecin Poncet. Le lecteur, qu’il soit historien, voyageur, passionné d’histoire s’en trouvera comblé parce que pour la première fois cet ouvrage présente la singulière aventure d’un jeune médecin mandaté par le roi Soleil, Louis XIV, pour aller soigner un roi aux fins fonds des hauts plateaux abyssins. Il semblerait que Charles-Jacques Poncet aurait réalisé deux manuscrits de son voyage. L’un se trouvant dans les réserves de la Bibliothèque Nationale ; le second, qui à l’origine était à Rome, a été localisé par Madame Claire Bosc-Tiessé à Montpellier, et qui a corrigé certains vocabulaires et apporté des précisions bibliographiques. L’ensemble, ci-dessous, est largement annoté par Eric Poix. L’histoire de ce voyage pourrait paraître anodine et ordinaire. Pourtant, il s’agissait d’une mission doublée d’un "alibi" tenu secret pour tenter de reconquérir ces lointaines terres chrétiennes en perdition. Cette terra incognita toujours convoitée par les royaumes européens avides d’étendre leur pouvoir, leur prosélytisme et de s’enrichir. Grandeur de l’Europe et du Royaume de France ! C’est en Afrique de l’Est, dans les hauts plateaux de l’Ethiopie, communément nommée Abyssinie, Habash, appellation encore péjorative signifiant "peuple mélangé" par les Arabes, que s’est développée une des toutes premières civilisations chrétiennes au monde, avec la Palestine, l’Anatolie et l’Arménie. Le terrain y était sans doute favorable car entre l’Egypte et la Nubie, et le Yémen, siège des grands royaumes sud-arabiques et Sabéens, - donc d’échanges et de spiritualité - l’Ethiopie y joua un rôle important. Au cœur des routes caravanières, non loin du célèbre "pays de Pount", l’Ethiopie vit naître vers l’an 0, le royaume sabéen d’Axum dans le Tigray, dominant ou vassal de celui de Maareb, yéménite, bien plus vaste et riche que lui. Aujourd’hui encore, les débats demeurent vifs et épidermiques : qui était le premier, le plus fort, le plus influent, l’Africain ou l’Arabe ? Néanmoins, le pays des Ethiop’s est incontestablement un creuset spirituel fondamental dans l’histoire de l’Humanité. Frumentius et autres moines syriaques n’ont-ils pas évangélisé cette région au IIIème siècle après Jésus-Christ ? Des luttes religieuses s’annonçait déjà ici : l’éradication du polythéisme démodé et du judaïsme archaïque. Axum était depuis plusieurs siècles un des centres religieux, spirituels, politiques et économiques les plus florissants, grâce à la circulation des biens (encens, myrrhe, esclaves, ivoire) et des idées. On y érigea les plus grandes stèles ou obélisques du monde, et on protégea de la lumière et de l’intrus les fameuses tables de la Loi, remises ou subtilisées à Jérusalem et menacées par les invasions perses il y a près de 3000 ans. L’Ethiopie du Nord fut donc durant des siècles une terre chrétienne protégée, sorte de "chasse gardée" par elle-même, de sanctuaire hermétique, de monastères cachés depuis l’avènement de l’islam au VII e siècle après J.-C. Cette région fut donc cernée, courtisée, encerclée par les hordes musulmanes, ainsi nommées, encouragées par des conquérants divers venant d’Arabie, du Harrar (le Gragne) qui n’hésitaient jamais a enrôler les tribus païennes, Gallas ou autres, avides de butins, de conquêtes et de revanche. C’est ainsi que cette Ethiopie, plus que courageuse, s’est retranchée dans sa propre histoire, dans l’origine de "sa" chrétienté primitive, exaspérant ainsi les ecclésiastiques romains ou de Palestine. Elle s’est s’appropriée une partie de l’histoire religieuse : Lalibela n’est-elle pas nommée "la Nouvelle Jérusalem" au XII e siècle, la sauveuse du Saint Sépulcre ? elle s’est inventé des contes, et s’est appropriée de bien belles légendes : la Reine de Saba, la dynastie Salomonienne, le roi Mage Melkior, le pays du Prêtre Jean. N’a-t-elle pas les fameuses Tables de la Loi, secrètement et jalousement gardées à Axum depuis près de 3000 ans ? Magnifiée par Lucy découverte en pays Afar en 1974, l’Ethiopie peut bien s’enorgueillir d’être à l’origine de l’Humanité. On lui laisse bien volontiers. C’est dans ce pays, quasi inconnu à la fin du XVIe siècle, que la France enverra un petit Poncet, chargé d’engager les prémices d’une nouvelle évangélisation catholique, sorte de relais français pris aux jésuites italo-espagnols et portugais. Les vieilles querelles entre Jésuites et Franciscains se réveilleront au Caire dans cette affaire. Une bien grande mission pour des moyens mesurés. Néanmoins, il fallait saisir l’occasion orchestrée presque en secret par le consul de France, Monsieur de Maillet et supervisée par Pontchartrain, ministre du roi Soleil. Afin de ne pas éveiller les soupçons, Poncet partira seul, secondé d’un missionnaire, le père de Brévedent qui revêtira pour la cause, un habit de valet. Ce dernier, à la santé fragile mourra à une demi-journée de Gondar le 9 juillet 1699. Poncet arrivera seul à Gondar le 21 juillet et y séjournera jusqu’au 2 mai de "l’an de grâce 1700". Il y découvrira une vraie cité (d’ailleurs la seule, avec Harrar, bien éloignée), une noblesse, des châteaux, et passera son temps à soigner et à observer. Nous découvrirons son récit authentique, chargé de nombres détails et de réflexions.

Quelles étaient les enjeux de cette double mission à Gondar ? Celui de soigner un roi et sa cour, et d’étendre les territoires évangélisables ? On peut supposer que cette dernière mission n’était pas la préoccupation majeure de Poncet. Depuis le XV ème siècles (époque des conquêtes des Indes occidentales et orientales), certains grands royaumes européens nourrissaient cette idée fixe jusqu’aux plus lointains pays, la Chine et le Japon, la terre de feu… Conquérir et évangéliser. Dans notre cas, le résultat fut décevant, insignifiant, voire néfaste. Des intrigues religieuses et diplomatiques ont écrasé les tentatives d’un certain Mourat, nommé à la hâte ambassadeur d’Ethiopie pour rencontrer Louis XIV à Paris. Malgré les nombreuses démarches de Poncet , audiences obtenues auprès du grand roi français et du pape Clément XI, celui-ci se retrouvera écarté de la mission officielle mandatée par le Royaume de France. Sans doute mal préparée et à la hâte, la seconde mission dirigée par le sieur Du Roule le 19 juillet 1703, eût de nombreux déboires et ennuis dans les pays mahométans. Pris pour des sorciers, tous ses membres furent massacrés avant de parvenir à Gondar. James Bruce, le célèbre explorateur écossais ayant vécu dans ces contrées dans les années 1770, relate ces faits. Encore une fois, après les premières tentatives portugaises de Francisco Alvarez (1520) et de Pero Paiz (1620, édifiant même au château/basilique au Lac Tana), et de quelques autres, les missions catholiques pour remettre ces Abyssins sur la vraie voie chrétienne se solda en échec. Car avec Poncet, rien n’a pu être tenté, mais sa présence et ses actions médicales fort appréciées ont laissé des traces indélébiles dans les mémoires. Bien plus tard, alors que Gondar n’était plus que ruine, Ménélik II consentit à ce que des missions catholiques s’installent en Erythrée, dans le Harrar, à Addis, mais surtout pas dans les hauts plateaux, siège incontestable du clergé orthodoxe éthiopiens. Méfiance régnante, aucun prosélytisme n’est accepté.

J’ai moi-même une histoire avec Gondar et c’est sans doute pour cela aussi que l’Abyssin Poncet m’a tant interpellé. J’ai passé ma tendre enfance dans le sud-marocain, bercé par les rivages côtiers d’Agadir, de Mogador et surtout de Safi. Naturellement, je construisais des châteaux dans le sable, certainement inspiré par les imposantes forteresses portugaises omniprésentes. Pouvais-je imaginer que les mêmes constructeurs guidés par Don Joao de Castro élaboreraient des édifices similaires à des milliers de lieues de là, de l’autre côté de l’Afrique ? Adulte, je me retrouvai au pied de ces palais gondariens avec une question : "qu’est-ce que ces Portugais ont bien pu faire là ?". Nous sommes en 1975 : le Roi des Rois, Haïlé Sélassié, dernier dépositaire de la dynastie salomonienne se meurt. Nous sommes à un tournant de l’histoire éthiopienne. Ensuite, durant l’été 1980, en pleine saison des pluies humides et froides, je me levai très tôt à six heures, intrigué par des bruits. Me précipitant vers les ruines des palais au centre de la cité sur une placette aménagée pour les rassemblements, j’assistai effaré à un spectacle étonnant. Dans la brume épaisse, c’était l’heure de l’enrôlement obligatoire : endoctrinement par injonctions rythmées par le fouet. Impassible et silencieuse la foule martyrisée se tient rassemblée non loin des ruines portugaises. Marxisme et Léninisme obligent et dictent. J’ai connu bien d’autres histoires, à Axum, Massawa (Erythrée) et à Gondar. Des fêtes de Noël, Timkat, Fassikat, Maskal et même celles du millenium éthiopien. Recueillement, concerts de musique classique, fêtes religieuses et processions. Toutes me rappellent ces temps anciens, ces explorations tragiques, et je remarque encore aujourd’hui que les coutumes et les mœurs ont bien peu changé. Aujourd’hui Gondar, la première véritable cité abyssine doit beaucoup à cette multitude de palais et de châteaux. Renommée, elle attire les touristes, les nostalgiques et la diaspora éthiopiennes. Nous sommes charmés par l’ambiance qu’elle dégage, par les imposantes demeures et vestiges d’un passé fastueux. Chacune est différente : Châteaux de Facilidas, des Yasous, le bassin et les jardins funéraires de Facilidas, l’impressionnant palais richement ouvragé - le dernier ? - de la reine Mentwab, fréquenté lui par James Bruce. Nous sommes sensibles aux bains (sorte de hamam) élaborés dit-on encore par le Sieur Poncet. Il y subsiste les crochets en corne animale qui permettaient à la cour royale de laisser leurs habits et étoffes. Aujourd’hui toujours, nous sommes charmés par l’Eglise Debré Behan Sélassié au plafonds couvert d’anges aux grands yeux. L’Ethiopie renait ces dernières années avec de grands et multiples projets. Gondar et ses châteaux perdus vient d’obtenir un soutien de restauration précieux d’une autre ville historique, Vincennes. Histoire de châteaux forts, me direz-vous ? De royaumes amis et de voyageurs intrépides. Je suis très heureux d’avoir pu contribuer à la publication de cet ouvrage et à sa documentation iconographique. Passionné par cette région, ce fut un réel plaisir de chercher dans ma bibliothèque et de retrouver les lieux fréquentés et mentionnés dans ce récit. Le choix de l’éditeur a comblé mes souhaits, ceux de lier écrits et images afin de mieux emporter le lecteur dans cette épopée et courageuse mission du Sieur Poncet.

José-Marie Bel Ethnologue, spécialiste de l’Ethiopie

Références citées :

Liées aux voyages de Poncet :
- Histoire de la France avec l’Abyssinie Chrétienne, sous les règnes de Louis XIII et de Louis XIV. (1684 - 1706). D’après les documents inédits des archives du Ministère des Affaires Etrangères. par le Vte De Caix de Saint-Aymour. Paris, Librairie Africaine et Coloniale. A. Faivre et H. Teillard, Ed. 1892.
- Un Voyageur Officiel envoyé en Ethiopie sous Louis XIV. Correspondance et documents inédits relatifs à Lenoir du ROULE ; par Th. LHUISSIER. Paris, Ernest Leroux, Ed. 1890.

- Jean-Christophe Rufin. L’Abyssin. Gallimard, 1997.
- Marek Halter, la Reine de Saba. Robert Laffont, 2008.
- Jean de la Roque. Voyage de l’Arabie Heureuse CF / LA LANTERNE MAGIQUE
- Thorkild Hansen. La Mort en Arabie. Edition de L’Aire, Lausanne, 1962. (puis Actes Sud, 1988).
- Botanique au Pays de l’Encens. José-Marie Bel en compagnie de Théodore Monod. Exploration naturaliste au Yémen. Editions Amyris, deuxième édition. Bruxelles, 2001.

Citez si possible : www.espacereinedesaba.org

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